À Pessac, tu recycles
et tu récup’

Économie circulaire. Seconde main. Recyclage. Dans la métropole bordelaise, les initiatives de récupération se multiplient et s’intègrent au quotidien des habitants. Plus qu'un effet de mode, ces projets semblent voués à durer. A Pessac, l'association Etu'Récup en est la preuve.

Presque dissimulée sous la sphère blanche du Crous de Pessac, l’entrée de la boutique Etu’Récup se fait discrète. Pourtant, en pénétrant dans les lieux de l’association, l’ambiance est tout autre. Pleine de vie et d’objets de seconde main entassés. Les bénévoles se déplacent rapidement entre les allées pour exposer à la vente des objets à prix réduits. Gérard, bénévole et membre du bureau depuis quatre ans, a été témoin de « l’essor rapide » de l’association. 

L'entrée d'Etu'Récup est simplement signalée par ce drapeau et ce portant.

L'entrée d'Etu'Récup est simplement signalée par ce drapeau et ce portant.

La boutique est organisée en plusieurs sections. Il y en a pour tous les goûts : électroménager, livres, vêtements, ou encore meubles. Meubles qui ont d’ailleurs mené à la création de l’association en 2014, afin que les étudiants puissent aménager leur appartement à moindre coût. S’ils représentent 80% des adhérents, Etu’Récup accueille tous types de publics, avec l’intérêt réaffirmé par Gérard de « mélanger les personnes et créer une mixité. »

Être pédago dans les assos 

En s’engageant dans l’arrière-boutique, le bois fraîchement coupé saute aux yeux du visiteur. C’est là que prennent place les différents ateliers pédagogiques proposés par l’association de récupération (électro-info, atelier bois, couture, ou encore zéro-déchet). Dans le local d’à côté, les dons sont entassés. Et chaque catégorie a son espace. Mais par terre, du vide demeure : il faut pouvoir circuler. Ce qui n’est pas toujours possible, en période d’affluence de dons. 

Gérard, bénévole et membre du bureau, explique le fonctionnement de l'atelier bois.

Gérard, bénévole et membre du bureau, explique le fonctionnement de l'atelier bois.

Dylan pèse les dons qui viennent d'arriver.

Dylan pèse les dons qui viennent d'arriver.

« L’objectif est de jeter au minimum, mais on ne peut pas mettre en vente tous les dons. », indique Gérard. Alors, pendant qu’Etu’Récup gagnait de l’ampleur, les partenariats avec des filières de recyclage se sont multipliés. En témoigne le nombre de bénévoles qui ne fait qu’augmenter ces dernières années, pour atteindre la soixantaine en 2021.

Des dons à n’en plus finir

Dans le local de stockage, chacun s'affaire à sa tâche. D’un côté, Dylan, pèse toutes les arrivées. Car c’est en poids que les dons sont mesurés ici. De l’autre, Mathilde, munie de gants, trie les vêtements. Certains seront vendus dans la boutique, et d’autres repartiront dans des filières de recyclage, telles que « La Tresse ». Etu’Récup lui expédie 150 à 200 kilos de vêtements toutes les deux semaines. 

Ding, dong. La sonnette retentit. Ce sont des particuliers venus déposer des objets. « S’il y a souvent des dons ? Oh oui, au moins plusieurs fois par jour ! » raconte Dylan. « Depuis que je suis bénévole, je n’ai jamais vu un jour sans don. »

« Depuis que je suis bénévole, je n’ai jamais vu un jour sans don. »

Dylan, bénévole.

Des donateurs sonnent à la porte pour déposer leurs objets.

Des donateurs sonnent à la porte pour déposer leurs objets.

L’adhésion fait le larron

Cinq arrêts de tram seulement séparent Etu’Récup du cœur de Pessac, où la Maison du vélo, antenne de l’association, s’est installée en 2018. Déjà, sur le trottoir, un orchestre de sonnettes et de cliquetis de roues traverse les vitres du bâtiment. À l’intérieur, un espace entièrement dédié à la réparation de vélo est disponible… Contre un minimum de trois euros. En échange de ce soutien financier, les adhérents ont accès aux conseils de l’équipe de bénévoles. 

A la Maison du vélo, des adhérents suivent les conseils des bénévoles.

A la Maison du vélo, des adhérents suivent les conseils des bénévoles.

Au fond de la pièce, tasse de café scotchée dans une main, clé-à-molette vissée dans l’autre, Cédric, animateur de la Maison du vélo, s’acharne sur les freins d’un vélo noir. Les lunettes embuées par le masque et la chaleur ambiante, il pose volontiers ses outils pour parler des lieux aux nouveaux venus. « Ça fait longtemps que je travaille dans les ateliers vélo, (…) notre premier atelier de réparation aux Garages modernes, c’est moi qui l’ai ouvert en 2007. Maintenant l’association compte plusieurs branches dédiées au vélo dans Bordeaux et ses environs. »

Se débrouiller pour réparer 

Le bénévole ne tarde pas à se remettre au travail, fouillant régulièrement dans des bacs en bois, jonchés les uns sur les autres sous des tables en bois. Ces caisses contiennent des pièces d’occasion proposées à des prix avantageux, qui ont été récupérées dans des entreprises ou sur des vélos irréparables. « Ici on constitue des stocks de pièces de rechange pour les personnes qui n’ont pas prévu de remplacer par du neuf », raconte Cédric, « on a volontairement choisi d’entreprendre une démarche de débrouille et de récupération. »

Au-delà des prix attractifs et du recyclage, l’idée de l’association est d’accompagner ses membres dans la restauration intégrale de leur vélo. Le défi est alors de s’adapter aux envies et à l’expérience de chaque adhérent. Entre deux gorgées de café, Cédric affirme que l’atelier attire tout type de public : des « étudiants qui n’ont pas trop de moyens » aux « gens à l’esprit écolo dans la mouvance de la récupération » en passant par les sportifs et les férus de voyages.

Dans les caisses en bois s'entassent les outils.

Dans les caisses en bois s'entassent les outils.

Des motivations financières et écologiques 

Derrière lui, Awa, étudiante, entame sa quatrième heure de bricolage. « Au total j’ai passé une dizaine d’heures à réparer mon vélo. Il commence seulement à être en état de rouler. Tout était à changer. » Animée par la volonté du « do-it-yourself » (DIY), le faire soi-même, la jeune femme affirme pourtant « n’avoir jamais touché un outil » auparavant. « Je suis arrivée sans rien connaître, j’étais simplement intéressée par le fait de réparer mon vélo moi-même. »

Comme Cédric l’expliquait plus tôt, de nombreux étudiants se rendent à la Maison du vélo pour réparer leur moyen de locomotion à faible coût. Awa l’affirme, ses motivations sont également financières. « Évidemment le coût est bien moindre que si j’avais investi dans un vélo neuf, c’est aussi pour ça que je me suis tournée vers l’association. ».

Un dernier coup de cric, et c’est fini pour aujourd’hui. La jeune femme, toute de noir vêtue, essuie ses mains pleines de cambouis et constate l’étendue de son travail, le regard plein de fierté. « Je suis tombée sur la Maison du vélo complètement par hasard. En venant je ne savais pas dans quoi je m’engageais, et finalement je me suis dit « allons-y ». 

Prochaine étape pour la Bordelaise : ajouter un porte-bagage à l’avant de son vélo. Peut-être même que Dylan est en train de le réceptionner dans l’arrière-boutique d'Etu’Récup.

Des roues d'occasion sont stockées au cas où un arrivant avec un pneu crevé se manifesterait.

Des roues d'occasion sont stockées au cas où un arrivant avec un pneu crevé se manifesterait.

« Je suis tombée sur la Maison du vélo complètement par hasard. En venant je ne savais pas dans quoi je m’engageais, et finalement je me suis dit "allons-y".»

Awa, étudiante et adhérente.

Awa resserre sa roue arrière.

Awa resserre sa roue arrière.