Lovers de Pøbel, la réussite norvégienne du confinement
De nombreuses œuvres de streetart inspirées de la crise actuelle ont vu le jour à travers l’Europe. En Norvège, le street-artiste Pobel a peint sur un mur de la petite ville de Byrne, une œuvre intitulée Lovers. Nous l’avons rencontré, virtuellement bien sûr, pour en savoir plus sur son travail en ces temps de pandémie.

Comment vous est venue l’idée de peindre cette œuvre, et que représente-t-elle pour vous ?
« L’histoire commence lors d’un voyage au Japon il y a plusieurs mois maintenant. À l’époque, la crise n’était pas déclarée. Pourtant les gens portent tous des masques là-bas, c'est très étrange quand on vit en Norvège. Ensuite, je suis parti au Pérou en décembre. Lors de notre dernière escale à Lima, les gens commençaient à entendre parler du virus. Ils nous faisaient les gros yeux quand on se rapprochait trop près d’eux. Quand je suis rentré en Norvège, on incitait fortement les personnes revenant de voyage à se confiner. J’en ai profité pour réfléchir à ce que je pourrais faire pendant ce temps « libre ». Le thème des masques était ce qui m’inspirait le plus. J’ai cherché sur Google si d’autres artistes avaient déjà lié le thème de l’amour, du baiser et celui des masques et je n’ai rien trouvé. J’ai très vite eu l’idée de représenter deux amoureux qui s’embrassent avec leurs masques. Le but était de montrer qu’on peut tirer quelque chose de positif de cette crise, même avec toutes ces mesures de distanciation sociale. Là où je suis plutôt fier, c’est d’avoir exposé Lovers la veille de l’annonce du confinement général en Norvège, le timing était bon. »
Quels retours avez-vous eus par rapport à votre œuvre ?
« Vous savez moi, je suis un conteur, mes œuvres racontent des histoires et chacun en fait sa propre interprétation. C’est un peu comme jeter une bouteille à la mer. On sait ce qu’on met dedans, mais on ne sait pas qui va la recevoir ni dans quelles conditions. Les retours ont donc été très différents, certains m’ont dit qu’ils aimeraient se marier sous ce mur et d’autres ont vu dans cette œuvre un moyen d’oublier leur rupture… Vous voyez, c’est le jour et la nuit. Mais globalement c’étaient des retours très positifs. Et puis, Lovers a fait le tour du monde, cette interview en est la preuve. J'ai même eu le droit à ma page dans le New York Times.»
Vous voyagez beaucoup pour certains projets. Comment allez-vous faire avec cette crise ?
« J’ai déjà un projet en Russie qui a été annulé, malheureusement. C’est certain que cela va être compliqué pour moi de travailler de la même façon. Heureusement, je vis dans un coin où la nature est très présente et qui m’inspire énormément. Néanmoins, les voyages étaient aussi une bonne source d’inspiration, ça me permettait d’apprécier d’autant plus la Norvège (rires). J’ai déjà contacté la mairie de Byrne pour essayer de travailler avec eux. Rien n’est fait mais c’est évident que je vais devoir me concentrer sur des projets plus locaux. »
Pour le monde de la culture, la période est très difficile sur le plan économique. Qu’en est-il pour vous ?
« Personnellement je n’ai pas à me plaindre. Souvent mes projets à l’étranger me coûtaient très cher et je vivais à « l’équilibre ». Or, le confinement m’a forcé à travailler beaucoup plus dans mon atelier et j’ai vite pu produire mon œuvre Lovers. Elle s’est très bien diffusée. Aujourd’hui j’ai de nombreuses commandes de produits dérivés pour cette œuvre. On peut dire que j’ai réussi à saisir la bonne opportunité pendant le confinement. Même si l’économie dérape, ce qui je pense va arriver, j’ai plutôt assuré mes arrières. Cela va même me permettre de m’adonner à d’autres supports comme la photographie ou la sculpture. »


